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«No» d’Ercole Lissardi, par Antonio Borrell

Ercole Lissardi est le pseudonyme d’un auteur discret, qui serait né à Montevideo en 1951, et qui a commencé sa carrière littéraire en essayant de se faire passer pour déjà mort. C’est pour le publier lui, et deux ou trois autres (Felipe Polleri, Rafael Courtoisie), que le jeune éditeur Martin Fernandez s’est lancé dans l’aventure HUM en 2007.


Lissardi publiait depuis 1994 (notamment chez Fin de Siglo), après avoir longtemps vécu au Mexique pendant les années de dictature en Uruguay. Son œuvre littéraire est centrée sur l’érotisme, (parfois taxé de pornographie, ce dont il se défend) à travers des textes courts, dépouillés et très denses. Il est également publié en Argentine et au Mexique. En tout plus de 25 ouvrages dont, chez HUM : Los secretos de Romina Lucas (HUM, 2007), Horas-puente (HUM, 2007), Ulisa (HUM, 2008), Una como ninguna (HUM, 2008), La vida en el espejo (HUM, 2009), No (HUM, 2010), La bestia (HUM, 2010).


Une bande joueurs médiocres se retrouvent dans un club de tennis de Montevideo. Liés par une amitié superficielle, ils se connaissent à peine en dehors. Le narrateur est l’un d’eux. Juan José Delmònico, alias Jotajota en est un autre : ne payant pas de mine, il passe pour un minable aux yeux des autres. Pourtant, un jour, au retour d’un séjour en Espagne, il invite ses amis chez lui. Ils découvrent son appartement somptueux dans un quartier chic, et sa jeune épouse, la superbe Helena. Pour le narrateur c’est le coup de foudre, et elle semble y répondre. Commence alors une relation perverse de domination et soumission, très cérébrale, car elle ne lui accorde jamais plus qu’une rapide masturbation, sans rien dévoiler de son propre corps, et toujours dans des lieux et des moments où ils risquent d’être surpris. Malgré toutes les tentatives de l’homme pour « aller plus loin », elle ne cède jamais, et ne lui laisse aucun espoir de « mettre fin à son pénible supplice ».


Croyant parvenir à ses fins par la ruse, ce narrateur va se rapprocher encore plus du mari, en se faisant passer pour homosexuel pour ne pas éveiller sa jalousie, et en devenant son indispensable partenaire au tennis : la paire devient la meilleure du groupe. Même en devenant un peu plus intime du couple, il n’obtient jamais rien de plus d’Helena que ce qu’elle est déjà disposée à lui accorder. Petit à petit, le piège va se refermer…


On pense inévitablement à « La femme et le pantin » de Pierre Louÿs, mais la situation est différente, car Helena ne promet jamais rien, ne donne pas de faux espoirs. C’est lui qui se piège lui-même, et n’arrive plus à s’échapper. Le lecteur aussi se fait piéger par une écriture efficace, sans aucun mot de trop, un ton sarcastique et sans pitié. C’est du grand art !


No, Editorial HUM, Montevideo, 2010, 90 pages.

ISBN : 978-9974-687-44-8


(Tomado de: http://lettrestrapiche.canalblog.com/archives/2021/05/08/)



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